Justine Augier ("De l'ardeur", "Par une espèce de miracle"...) qui pratique et incarne une forme de pudeur et d'éthique littéraire assez uniques voit son projet d'écrire sur la littérature comme lieu de l'engagement entrer en collision avec la maladie et bientôt la mort de sa mère. Alors que la nature même de l'urgence mute, l'intime et l'universel se tressent dans un texte bouleversant de justesse et de clairvoyance. Et qui rappelle le potentiel devenir résistant de chaque lecteur.
À l'intersection du littéraire et du politique un livre bref et fulgurant qui trouve sa place entre Hannah Arendt et Joan Didion. Pas moins.
J. a passé toutes ses vacances d'enfance dans une île. À la mort de sa mère, alors que la maison de vacances revient à son frère, elle décide de ne pas se battre et de faire construire sur cette île SA maison, il s'agit pour elle de s'installer dans l'île, d'en faire partie, d'être acceptée par le paysage comme par ses habitants, de devenir insulaire. Elle veut réinventer un ancrage, des souvenirs, un refuge sûr et tranquille sur la falaise toute proche du phare. Mais quand il s'agit de travaux rien n'est simple en ces lieux comme ailleurs, J. se heurte à toutes les difficultés possibles et imaginables, jusqu'à défaillir et avoir le sentiment de mourir. Alors pourquoi se mettre dans de telles situations ? Que symbolisent les maisons ? Quels sont ces attachements, ces fausses filiations, ces véritables entraves qui nous comblent de joies et nous donnent des sueurs froides ? Ce livre est celui de nos bonheurs inventés, reconstruits, envolés.
Suivre cette femme dans ses péripéties invite à méditer sur le sens profond de notre vie, sur le courage et la persévérance, sur l'espérance.
Dotant un professeur de philo d'un stoïcisme féroce et joyeux, Fernando Aramburu donne à voir les vicissitudes d'un homme, apparemment sans qualités, qui entend mettre un terme à cette comédie tragique qu'est la vie. Pendant 365 jours, il consigne invariablement et sans filtre aucun les faits saillants de son existence : les rêves débridés et les petites misères d'un homme un peu dépassé par la marche du monde mais à la mauvaise foi inébranlable !
Soit deux comètes adolescentes engagées dans des pratiques anorexiques sévères les menant à confondre vie privée et privatisation de soi. Dans le creuset de ses réflexions autour du corps - fabriqué, policé, souffrant voire annihilé par nos sociétés modernes -, Espedite compose la géographie des délires adolescents, en parcourt les territoires, les soubassements, les impasses et les issues de secours. En suivant les voies de ces intériorités possédées, l'utérus en guise de graal.
Quand le cinéma et la vie s'allient pour fabriquer du romanesque féroce, l'oeil de l'écrivaine s'allume. Qu'ont en commun "Les Oiseaux", "Marnie", "Body Double", "Working Girl", "Le Bûcher des vanités" et "Cinquante nuances de Grey" ? Autrement dit, deux indéboulonnables classiques d'Alfred Hitchcock, la bande image des années 1980 et le plus grand phénomène de porno-soft de notre époque ? Leurs héroïnes : Tippi Hedren, Melanie Griffith, Dakota Johnson, trois femmes activement disparues de mère en fille...
Sur le mode d'une narrative non-fiction réinventée, Hélène Frappat signe une enquête arachnéenne sur le réel proprement surréaliste d'une lignée de stars hollywoodiennes maudites. Et nous fait *voir* comme jamais ce que nous avions pourtant sous les yeux *depuis le début*.
Tom, psychiatre israélien à l'hôpital de Hod Hasharon près de Tel Aviv, soigne plusieurs patients, parmi lesquels Hephraïm Steiner, musicien octogénaire, et Roshan, jeune Palestinienne enceinte mais enfermée dans le déni de sa grossesse. Deux cas passionnants pour ce médecin dont les recherches portent sur l'inaudible, sur la communication intra-utérine - et qu'obsède ce qu'il a vécu et croit avoir entendu, le 11 septembre 1995, depuis le ventre de sa mère, alors que se jouait dans l'espace un drame : Soyouz ne répondait plus.
Autobiographie romanesque de Madeleine Gonzalès, connue par un portrait d'elle enfant au XVIe siècle et frappée d'hyperpilosité comme son père, "sauvage" du roi de France, et certains de ses frères et soeurs : des personnages singuliers, placés en marge de l'histoire officielle mais qui ont pourtant excité l'imagination et la curiosité des princes et des savants. Un roman passionnant de Mario Pasa sur cette lignée velue, qui nous offre de regarder les "monstres" avec les yeux d'un homme de la Renaissance tout en abordant des questions très actuelles, comme l'ostracisme, notre rapport à la nature et le pouvoir des images.
Naître soeur n'est pas inoffensif. Ainsi pour Vanessa Bell, peintre méconnue à l'aune de "la postérité de noyée" de sa cadette, Virginia Woolf. Ou pour Laura, romancière et aînée, qui veille sur les secrets, soustrait le poison des chagrins. Autant d'amours ennemies, de joies fébriles, de jalousies tristes, qui font les liens ambigus entre soeurs. Portrait en diptyque à la grâce époustouflante, ce récit subjectif de la vie de Vanessa Bell, exprime l'inquiétude d'exister et ce qui, parfois, permet de la conjurer : l'amour d'une soeur.
Après l'immense succès du Grand Monde Un ogre de béton, une vilaine chute dans l'escalier, le Salon des arts ménagers, une grossesse problématique, la miraculée du Charleville-Paris, la propreté des Françaises, « Savons du Levant, Savons des Gagnants », les lapins du laboratoire Delaveau, vingt mille francs de la main à la main, une affaire judiciaire relancée, la mort d'un village, le mystérieux professeur Keller, un boxeur amoureux, les nécessités du progrès, le chat Joseph, l'inexorable montée des eaux, une vendeuse aux yeux gris, la confession de l'ingénieur Destouches, un accident de voiture. Et trois histoires d'amour.
Un roman virtuose de Pierre Lemaitre
Vous avez survécu au Covid ? La guerre vous fait flipper ? Le réchauffement et les incendies vous inquiètent ? Vous n'avez pas encore bien saisi le concept de « points-retraite » ? Pas de panique.
Mémoires intimes d'un pauvre vieux essayant de survivre dans un monde hostile est fait pour vous.
Imaginez un livre qui aurait à la fois des vertus magiques - il ralentirait la course du temps et effacerait les rides -, et foncerait à deux cents à l'heure en se jouant d'un monde pré-apocalyptique, ne se préoccupant que d'une chose, triviale au possible : la survie de son héros-boomer.
S'essayant pour la première fois à l'exercice périlleux du journal intime - pour mieux le détourner - l'auteur de Cantique de la Racaille et de Sainte-Croix-les-Vaches livre un roman hilarant où rien ne lui est épargné, ni le théâtre des réseaux sociaux, ni l'aventure périlleuse des sites de rencontres pour seniors, ni même l'éligibilité à la carte croûton-SNCF. Sans oublier les considérations philosophiques induites par cette douloureuse question : boomers, nous qui allons être des milliards dans la décennie qui s'annonce, qu'allons-nous faire de nous ?
Vincent Ravalec est écrivain, scénariste et réalisateur-producteur.
Ses livres ont reçu de nombreux prix littéraires dont le prix de Flore pour Cantique de la Racaille.
Naître ou ne pas naître, telle est l'unique question. Certains trépignent dans la coulisse, avides de couper le cordon, de bondir en scène, d'y camper un personnage, d'autres se demandent bien pourquoi, pourquoi on devrait s'arracher au farniente amniotique, encoconnés qu'ils sont dans le ventre maternel comme au coeur d'un doux hamac. Tel est notre anti-héros, le futur Charles Dubois, qui déplore plus que tout qu'il y ait une fin à la délectable somnolence foetale. Une nostalgie patente dès"son expulsion vers le monde"où il offre l'apparence non pas d'un baby démangé de vitalité, mais d'un"tas de gelée", un avorton amorphe qui, dès l'origine, fait tache dans une famille vouée au culte de l'effort et de la responsabilité. Tôt orphelin d'un général de père tué dans une accident de friteuse, pris dans l'impitoyable étau formé par une mère anxieuse et le volontarisme crispant d'une soeur musicienne, il est d'abord confié à la gutturale férule de Margrit l'Autrichienne qui échoue à viriliser ce garçonnet. Maillon mou de la chaîne sociale, il consterne comme il respire et sa scolarité s'avère un chemin de croix ponctué d'humiliations carnavalesques et de naufrages sentimentaux. Néanmoins, stratégie secrète et soupape mentale, Charles s'en sort en cultivant l'art des univers parallèles, se téléportant dans des mondes imaginaires qui assouvissent ses désirs fondamentaux : s'abstraire et se distraire. Marathonien de l'inappétence grandiose, oisif de droit divin, mais tenu d'assumer des rôles factices, on l'accompagnera néanmoins à l'université, à l'armée, d'emplois précaires en vocations passagères, seul, en famille ou soumis au parasitage inévitable d'un collègue. À tous, il n'oppose que sa flottaison molle dans un océan de lymphe. Frère des Bartleby ou des Oblomov, Charles Dubois, lecteur de Pessoa qui lui apprend"la dissidence envers la vie", incarne au mieux cette sentence d'Henri Michaux :"Ne faites pas les fiers. Respirer, c'est déjà être consentant". Le miracle est que, de cette vie monologuée avec une minutie distanciée, se dégagent un humour colossal et une mélancolie bouleversante.
Un ancien enseignant parisien expatrié dans le désert californien attend l'arrivée sans cesse différée de sa compagne dans un bâtiment encore vide que ces deux citadins, formés aux arts de l'image, veulent transformer en école de photographie - ce lieu leur servira aussi d'habitation. Mais un imprévu dans le projet du couple oblige le narrateur à dissimuler sa présence aux yeux des autorités. Bientôt, la situation se délite, et c'est toute son existence sur internet qu'il doit faire disparaitre. Après avoir commencé à abattre des cloisons et senti des odeurs étranges dans les lieux où il se cache, il finit par s'aventurer audehors, alors même qu'une vague de chaleur et l'apparition d'un nouveau virus rendent les déplacements complexes.
« C'est chaque fois pareil, quand apparaît cette photo de moi à quinze ans avec ces cheveux bruns, la seule qui existe encore de cette époque, comme une pièce à conviction que j'aurais omis de détruire, je me fais l'effet d'une fugitive qu'on démasque. » Une femme remonte le cours de sa vie, à la manière d'un détective qui enquêterait sur son propre crime, à la recherche d'un secret inconnu et inavouable, à propos d'une soeur morte ou peut-être d'un fils. Des maisons, des mariages, des décès, des baptêmes, des bombardements, les lunettes d'écaille d'un officier allemand, des voisins juifs qu'on veut croire enfuis à Copacabana : en trente- six brefs chapitres se trame le double panorama d'une existence dont les zones d'ombre s'épaississent à mesure que s'en approche l'origine et du destin d'une génération qui a cru toucher au bonheur.
Dans une écriture vertigineusement subtile, Yves Revert esquisse le portrait inépuisable d'un personnage au féminin dans une époque qui s'est voulue échappée de l'Histoire. Et sans doute chacun d'entre nous reconnaîtra une part de soi-même dans cette femme qui s'interdit les faux pas mais qui est toujours au bord d'une faille. Qui a rêvé de se faire une belle vie mais qui en éprouve à chaque instant la féroce irréalité. Et qui se raconte devant nous une histoire dont elle ne sait si elle a vraiment existé.
«Elle aurait pu renoncer. Elle aurait dû renoncer.Elle se le répéta bien un million de fois toutes les années qui suivirent. Elle eut d'ailleurs une hésitation, peut-être valait-il mieux rester, se rallonger dans la chambrée, à écouter ses deux autres soeurs qui gesticulaient dans leur sommeil, pétaient et miaulaient sous leurs draps à cause de leurs rêves lascifs tout juste pubères. Peut-être valait-il mieux abdiquer, enrager, et se délecter de sa rage, puisqu'il y a un plaisir dans l'abdication, cela va sans dire, le plaisir tragique de la passivité et du dépit, le plaisir du drapage dans la dignité, on ne nous laisse jamais rien faire, on a juste le droit de se taire, on nous enferme, alors que les autres là-bas au loin s'amusent et se goinfrent, qu'est-ce que j'ai fait dans mes vies antérieures pour mériter ça, oh comme je suis malheureuse.Peut-être aussi que le jeu n'en valait pas la chandelle. Mais le jeu, n'est-ce pas, en vaut rarement la chandelle. Le jeu n'est désirable que parce qu'il est le jeu.»Véronique Ovaldé, à travers l'histoire d'une famille frappée par une mystérieuse tragédie, ausculte au plus près les relations que nous entretenons les uns avec les autres et les incessants accommodements qu'il nous faut déployer pour vivre nos vies.
Deux amis d'enfance cabossés par la vie se lancent sur les grandes étendues islandaises à la recherche des sentiments perdus. L'un d'eux s'est évadé d'un hôpital psychiatrique, déclenchant le courroux d'une infirmière psychopathe lancée à leurs trousses... Portrait touchant de la dépression, travelogue rocambolesque et critique acerbe d'un monde en perdition, le roman de Bergsveinn Birgisson, aussi poétique que politique, est une célébration de la solidarité et de l'amitié.
Lorsque Simon, physicien à présent retraité, commence à perdre prise avec la réalité et l'usage de la parole, son épouse Eva, avec laquelle il vivait depuis des décennies, s'efforce de composer avec ce silence nouveau qui investit son quotidien. Dès lors, le passé se rappelle immanquablement à elle. Et avec lui, ces lourds secrets qu'elle et son mari se sont efforcés de conserver l'un pour l'autre sans jamais les dévoiler à leurs filles. Tandis qu'elle s'en trouve désormais la seule porteuse et dépositaire, il apparaît de plus en plus complexe de taire ces non-dits, au risque de s'isoler encore davantage.
Dans ce roman magistralement orchestré, Merethe Lindstrøm déploie un drame familial subtil où il est autant question du poids de la grande histoire sur les trajectoires individuelles, que des secrets de famille dont les répercussions finissent infailliblement par se faire ressentir au fil des années.
Aux marches de l'Empire « à cent têtes et cent corps », sommeille une province minérale et nue où le froid, le givre, les bourrasques semblent ankyloser les habitants d'une bourgade qui ne signalait jusque-là ni notoriété historique, ni intérêt géographique, si ce n'est d'être placée à la frontière « d'un pays dont la bannière se frappait d'un croissant d'or », et dont la vitalité contraste avec l'épuisement ranci du village aux passions tristes.Un jour, le curé est découvert mort. La tête fracassée par une pierre. De quelle nature est le crime ? Qui pouvait en vouloir à ce curé d'une terre où les chrétiens et les musulmans vivaient depuis toujours en bonne entente ? Que faire, qui accuser, et qui entraver dans son action si, à partir de ce meurtre, s'ordonne toute une géométrie implacable d'actes criminels et de cruautés entre voisins ? Il y a un heureux : le Policier, Nourio, car « c'était fabuleux pour lui d'avoir une pareille affaire, dans ce lieu abandonné de toute fantaisie, de tout grain de sable, roulé dans l'ordinaire des jours ». Le voilà lancé dans d'inutiles recherches. À quoi sert de s'opposer au cours impétueux des choses ?Dans ce vieux monde de l'Empire qui s'affaisse, « dans un sommeil épais, s'enroulait dans sa léthargie comme un escargot fainéant bâille dans sa coquille », il y a tous les personnages, en chairs et en vices, qui conviennent au déroulement de la tragédie : chacun joue à merveille sa partition. Nourio, le Policier au teint olivâtre et aux pulsions incontrôlables. Baraj, l'Adjoint dont l'apparence de bête placide et musculeuse dissimule l'âme d'un enfant poète. Lémia, la fillette aux formes adolescentes dont les ombres et les pleins agacent les nerfs du Policier. Tant d'autres, et même les fantômes des temps passés, qui n'ont en commun, dans leur médiocrité âpre et satisfaite, dans le secret de leurs âmes, que d'agir en comparses du grand Effondrement de l'Empire. De suspens en rebondissements, l'intrigue haletante se double d'une grande réflexion sur nos errements contemporains, la volonté de quelques-uns de réécrire l'Histoire, la négation de certains crimes de masse et autres arrangements avec la réalité.
Nous sommes à Bizerte, en Tunisie, janvier 1921, sous le protectorat français. La vie serait presque douce pour le jeune docker du port de Bizerte, Tarik Aït Mokhtari, nageur longiligne et musculeux, s'il ne s'était heurté un matin, dans sa ligne de nage, à un obstacle infranchissable : il ne le sait pas encore, mais il s'agit d'un croiseur de bataille, survivant de la flotte impériale russe qui fuit l'irréversible et sanglante poussée des « rouges » et transporte à son bord toute une population d'exilés, de « blancs » aristocrates désormais appauvris, bousculés par le vent de l'histoire. Mais il ignore la guerre qui divise la Russie. Il vit à Bizerte, il est beau et pauvre, il a une soeur désirable, une mère veuve.Ce destroyer est-il « maskoun » ? Hanté, habité par un djinn, infréquentable pour le docker aux longs cils ? D'où vient le navire fantôme couleur d'âme grise ? Quel est son nom ? Que cherche-t-il à fuir ? Quelles horribles scènes de pogroms, de fermes incendiées quand les soviets lancent « le coq rouge », pillent, tranchent au sabre et fusillent, quelles images hantent à jamais les passagers du Georguii Pobiedonossetz ? Depuis le 18 décembre 1920, les Russes sont confinés à bord des bateaux de guerre en rade de Bizerte. Des prisonniers flottants. Tarik aurait été avisé d'en rester là. Mais, comme le chant d'une sirène, le docker entend soudain la voix d'une jeune femme, une voix de théâtre, et il aperçoit, chatoyante, sa robe de mousseline blanche, gonfler sur le pont du navire.A l'instant il en est captif.Yelena Maksimovna Mannenkhova, fille unique d'un riche baron, personnage qu'on dirait issue de La Cerisaie, a la beauté fragile d'une porcelaine qui va se briser. Chaperonnée par sa tante Sofia, elle fuit la même horreur que toute une classe sociale gisant sans pouvoir s'en libérer dans les coursives d'un navire qui sera leur prison, et peut-être leur destin. Tarik parviendra-t-il à la rencontrer ? Avant que le cosaque Bissenko ne tranche la blanche gorge de notre héroïne ? Avant que la soeur du docker ne se marie ? Avant que le monde ne referme les rideaux d'un théâtre pourpre sang sur ces deux innocents ? Vivront-ils ?
En septembre 2016, l'inénarrable Jerry Stahl touche le fond. La dépression qui le ronge depuis toujours est au plus haut, sa carrière et sa vie personnelle au plus bas. Lorsqu'il découvre au détour d'une improbable alerte Google « Holocauste » que des tours opérateurs organisent des voyages en car à travers l'Allemagne et la Pologne sur les lieux de la tragédie, il décide de s'inscrire. S'il ne peut soigner sa dépression, il ira la nourrir en compagnie de ces étranges « touristes des camps de la mort ». Roadtrip collectif dément, entre introspection récalcitrante et expérience post-gonzo, « Nein, Nein, Nein ! » se présente comme une enquête corrosive et hilarante sur le rapport disneylandisé aux lieux de mémoire, où Jerry déploie toutes les nuances de son humour tordu absolument unique.
Hannah est une Nisei, une fille d'immigrés japonais. Si son père l'a bercée de contes nippons, elle se sent avant tout canadienne ; alors pourquoi les autres enfants la traitent-ils de "? sale jaune ? " ?? Jack, lui, est un creekwalker, il veille sur la forêt et se réfugie dans les légendes autochtones depuis le départ de son frère à la guerre. Le jour où l'ermite tombe nez à nez avec un ours blanc au coeur de la Colombie-Britannique, il croit rêver - la créature n'existe que dans les mythes anciens.
Pourtant, la jeune femme inconsciente qu'il recueille semble prouver le contraire : marquée des griffes de la bête, Hannah développe d'étranges dons à son réveil. Des années 1920 à l'après-guerre, Marie Charrel brosse le portrait d'une Amérique du Nord où la magie sylvestre s'enchevêtre à la fresque historique. Contes japonais et légendes indigènes se lient dans une fabuleuse ode à la nature et à la fraternité.
«Je ne savais pas que les enfants avaient failli se faire tuer dans le volume précédent.Quand j'ai appris que c'était Pépère qui avait fait le coup, j'ai pigé un truc : qui ne connaît pas Pépère ne sait pas de quoi l'être humain est capable.»Benjamin Malaussène
Un premier roman dont un poème est le héros Comment un simple poème, inspiré par l'amour de deux femmes, a-t-il pu circuler dans toute la France, au creux des Années noires ? Comment ce seul poème, par le pouvoir d'un mot, a-t-il rendu l'espoir à tout un peuple, alors à genoux ?
Depuis des années, Xavier Donzelli se passionne pour l'histoire du mythique " Liberté " de Paul Eluard. Grâce à des recherches poussées dans divers fonds d'archives, il a réussi à retracer l'itinéraire du poème, de sa création à sa publication en 1942 à Alger, dans la revue Fontaine, puis, à des milliers d'exemplaires, dans la plaquette Poésie et Vérité 1942 de La Main à plume, à Paris. Bientôt repris dans la revue La France Libre à Londres, parachuté en 1943 au-dessus de Nantes, Orléans, Le Mans, Argentan, Caen, Lille, Amiens, Paris par les avions de Royal Air Force, traduit et diffusé hors de France, enfin adapté en musique, le poème, échappant à son créateur, rencontrera un écho exceptionnel : il deviendra l'un des textes emblématiques de la Résistance.
On le sait : c'est toujours la petite histoire qui fait la grande histoire. En levant le voile de la légende, Xavier Donzelli a voulu raconter celle des hommes et des femmes qui ont porté ces mots si simples, si puissants et universels, qu'ils pouvaient parler à tous. Paul Eluard, Nusch, Cícero Dias, Max-Pol Fouchet, Raymond Aron, André Labarthe, Louis Parrot, Lee Miller et Roland Penrose, Francis Poulenc et tant d'autres, célèbres ou anonymes, sont les messagers de " Liberté ". Dans ce premier roman choral, le lecteur entre dans une ronde, où chacun des personnages - auteur, éditeurs, imprimeurs, animateurs de revues, traducteurs, libraires -, prend sa part dans la diffusion d'une parole libre, porteuse de sens et mobilisatrice. Comment ces hommes et ces femmes de bonne volonté ont-ils pu, ensemble, déjouer la censure ? contourner les autorités de Vichy par des réseaux secrets et grâce à des publications clandestines ? Quels périls ont-ils endurés et quels drames cachent ces vers ? Les différents chapitres, conçus comme autant de scènes, nous invitent à suivre cette épopée, poétique et haletante.
Etienne rentre de vacances avec sa famille parfaite et son apparent bien-être. Sa vie est confortable, routinière. Il mène une vie normale, c'est l'essentiel.
Quand soudain, on annonce à la radio la mort de Jean-Jacques Goldman.
Avec cet adieu au totem et au ciment des classes moyennes, Aurélien Delsaux tire à vue sur notre époque, et il la touche en plein coeur.
Il est un temps où la mémoire réclame sa part de souvenirs, fidèles ou embellis, ou encore distordus par le passage des jours. Soixante-sept ans : c'est un âge raisonnable pour se livrer à cet exercice. Souvenirs de la classe de neige, à l'époque des premiers tire-fesses (ou « tire-flemme », en Suisse romande), souvenirs d'un bref séjour à l'École des beaux-arts, au temps de l'adolescence, souvenirs d'un labeur éprouvant, sans lendemain, souvenirs de la mort aussi ; et puis souvenirs de la famille, et notamment de trois oncles : l'un a combattu aux côtés du général Leclerc après avoir été enrôlé de force dans la Wehrmacht ; un autre a fait la guerre d'Indochine ; quant au troisième, fils d'un important fasciste italien, il est devenu un diplomate influent de la construction européenne. Trois oncles, trois fantômes qui reviennent toujours, confiant à leur neveu leur fierté, leurs souffrances, leurs petits et grands secrets, comme autant de moments douloureux de l'Histoire de France.
L'auteur évoque aussi les villes de sa jeunesse : Strasbourg, Paris, Lausanne, Aoste, Athènes, et enfin Arles, où il vit.
Et pour finir, un récit, entre réalité et fiction : deux vieux artistes vont mourir. Qui se souviendra de ces oubliés de l'Histoire de l'art ? Une histoire bâtie comme un bref roman noir.